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LE CAMP SOR SITAWEE

Temps de lecture : 3 minutes

LE CAMP SOR SITAWEE

Special report by Serge TREFEU (2011)

Ce camp était dans les années 90 l’un des plus réputés du sud de la Thaïlande, il se trouve dans la province de Nakhon Si Thammarat, au sud du pays. Il est dans la ville de Nakhon Si Thammarat, dans un quartier tranquille, au bout d’un minuscule soi (ruelle), le soi Buket, à côté du marché Ket.

 

 

Derrière les murs d’une vieille bâtisse se cache un petit camp dont la moitié de l’espace, aujourd’hui, a été transformé en gargote avec une table et quatre chaises. La femme du patron du camp cuisine des bons petits plats aux fidèles clients qui viennent tous les jours ici. Lors des entraînements, les plats qui mijotent dans les woks dégagent des senteurs épicées qui se mélange aux fortes odeurs de sueurs et de nammuay (huile chauffante) des boxeurs.

 

 

Les sacs de frappes sont dans un sale état, ils sont tellement usés qu’ils sont recouverts de bâches en plastique pour les protéger. L’endroit n’est pas très propre, des chiens se baladent dans le camp et font leurs besoins un peu partout. Cela ne dérange pas les boxeurs qui nettoient les excréments avec un jet d’eau, l’eau s’évacue dans une petite rigole, en face du ring. C’est un camp rudimentaire, à la thai…

 

 

Le Sor Sitawee existe depuis 30 ans et a été créé par Plapan Siisongklam, un ancien boxeur qui a grandi à Nakhon Si Thammarat. Plapan a commencé la boxe dans un temple, orphelin, les moines du temple l’ont élevé et lui ont enseigné l’art du Muay Thai. Ce temple, qui existe toujours à Nakhon Si Thammarat, s’appelait le Wat Sitawee. Plapan après sa carrière de boxeur à ouvert un camp et lui a donné le nom de « Sor Sitawee », ce nom est dédié aux bonzes du temple, grâce auxquels il a acquis tous les secrets du Muay Thai…

 

Plapan Siisongklam

 

Dans ce petit camp qui ne paye pas de mine, de grands champions ont été formés, il y a encore dix ans, le camp comptait en permanence une trentaine de boxeurs de hauts niveaux. Le plus connu des combattants qui a débuté sa formation ici est le légendaire Nokweed Devy. Ce grand champion des années 90 qui a fait plus de 400 combats a été plusieurs fois Champion du Lumpinee et deux fois Champion du Monde. Il est l’un des rares thaïlandais poids moyen à avoir combattu au K1 en catégorie lourds. Au Japon, il a affronté la star du K1 des poids lourds, Jérôme Le Banner et en Thaïlande il a rencontré deux fois le champion du Monde poids lourds, Paul Slowinski. Il a fait aussi de grands combats face à des pointures de l’époque tels que Prasert Kittikasem, Sakad Petchyindee, Santiengnoi Sitsurapong, Issara Sakeerin, Jomhod Kiatadisak, Stéphane Nikiéma et Danny Bill. Sa puissance de frappes avec ses middles et ses low kicks étaient dévastatrices. D’ailleurs lors d’un combat de rue clandestin, Nokweed a malheureusement tué l’un de ses adversaires, ce qui l’a conduit plusieurs années derrière les barreaux…

 

 

Les autres champions formés au Sor Sitawee sont aussi des références des années 90 avec le champion Wanphadet qui a été champion du Lumpinee en 126 lbs et Palaket, Champion du Radja en 130 lbs. Dans les années 2000, il y a eu Lipitichaï, Champion du Lumpinee en 118 lbs et Litichak, Champion du Radja en 118 lbs !

 

 

Le maître des lieux me montre avec fierté les photos encadrées, accrochés aux murs, de tous ses anciens champions. Plapan est très nostalgique de l’époque où son camp était rempli de grands combattants, de guerriers qui raflaient toutes les ceintures des stadium de la région, et des plus prestigieux stadium de Bangkok. A cette époque même le légendaire Kaosay Galaxy, le plus grand champion de boxe anglaise de toute l’histoire thaïlandaise, venait s’entraîner au Sor Sitawee, lorsqu’il devait faire des combats dans le sud du pays !

 

 

Plapan me confie que les choses ont bien changé, « aujourd’hui, la plupart des jeunes qui commencent la boxe vont faire deux ou trois combats, et vont arrêter tout de suite, ils vont trouver cela trop dur, ils vont faire du foot, ils préfèrent tous le football maintenant, le Muay Thai c’est fini… »

 

 

En effet, aujourd’hui il n’y a plus que huit boxeurs dans le camp, des enfants, le plus jeune à 10 ans (12 combats) et le plus vieux n’a que 14 ans (40 combats). Ces jeunes nakmuays font un footing quotidien de 15 Km qu’ils effectuent le matin avant d’aller à l’école. Dès qu’ils ont terminé l’école, ils arrivent vers 16h30 et commencent leur entraînement qui finit à 19h30. Aucun boxeur ne dors dans le camp, ils habitent tous dans le quartier, tout près du camp.

 

 

Les rounds aux paos, ici, se font sur 5 minutes, la séance de corps à corps dure 30 minutes et passe à une heure en préparation de combat. Les boxeurs sont encadrés par deux entraîneurs originaires de Nakhon Si Thammarat qui étaient des combattants « fimeuu » (technicien), leur style d’entraînement est donc beaucoup basé sur la technique. Avec Plapan qui a formé des grands champions, ces jeunes combattants sont entres de bonnes mains…

 

 

Très peu d’étrangers sont venus s’entraîner au Sor Sitawee. A la belle époque du camp, le champion japonais Natalute est resté 3 ans ici et a boxé pour le camp. Plus récemment, une combattante canadienne est restée un mois et un français quelques jours. Ils logeaient à 100 mètres du camp, dans un immeuble où des chambres sont à louer. Mais rare sont les étrangers qui viennent dans ce petit camp. Aujourd’hui, l’entraînement ici n’est pas extraordinaire vu le faible niveau actuel des combattants. Par contre Khru Plapan est un passionné avec une grande expérience du Muay Thai, il offrira sûrement de bons conseils aux combattants étrangers désireux de connaître le style « Muay Chaya » (style du sud)…